Interreligieux : « Démontrons par l’exemple que chrétiens et musulmans sont faits pour grandir ensemble »

Par Huê Trinh Nguyên, le 26/10/2018

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Les relations islamo-chrétiennes gagnent chaque année en épaisseur et en vivacité. Elles n’impliquent pas seulement les cadres religieux. Elles sont entretenues par celles et ceux qui sont convaincu-e-s que leurs valeurs spirituelles peuvent se rejoindre pour œuvrer ensemble dans la cité. La Semaine de rencontres islamo-chrétiennes (SERIC) en est le cœur vivant. Se déroulant officiellement du 10 au 25 novembre, l’édition 2018 déborde largement en octobre et en décembre, tellement les acteurs locaux veulent y prendre part. Qui est à l’initiative de la SERIC ? Le Groupe d’amitié islamo-chrétienne (GAIC), qui célèbre cette année ses 25 ans. Interview d’Hélène Millet et de Haydar Demiryurek, co-présidents du GAIC.


Saphirnews : Cette année, la Semaine de rencontres islamo-chrétiennes (SERIC) en est à sa 18e édition. Pourquoi est-il toujours aussi important de valoriser, mettre en œuvre les relations islamo-chrétiennes ?

Hélène Millet : L’amitié est une plante qui dépérit si on ne l’entretient pas. Il en est ainsi pour les bonnes relations entre chrétiens et musulmans, surtout si elles sont mises à mal par des actes ou des attitudes hostiles de certains de nos coreligionnaires. À temps et à contretemps, nous devons non pas affirmer gratuitement mais démontrer par l’exemple que nous sommes faits pour nous entendre et grandir ensemble. La joie que nous éprouvons à vivre ces moments où nous unissons nos forces pour réaliser un évènement ou une rencontre irrigue toute l’année qui suit.

La SERIC 2018 a-t-elle un thème fédérateur ou chaque association est-elle libre de définir son programme et sa thématique ? Pourquoi ?

Haydar Demiryurek : Tout comme les autres éditions de la SERIC, celle de 2018 est dépourvue de thème. Pourquoi ? Parce que nous ne souhaitons pas orienter ni brider d’une quelconque manière les initiatives locales. D’un lieu à un autre, les vécus, les sensibilités, les richesses et les aspirations diffèrent considérablement. L’évènement préparé n’est pas toujours une conférence-débat. Il y a aussi des visites de lieux de culte, des repas partagés, etc., qui ne se prêtent pas à la déclinaison d’un thème. Il convient de donner à tous et à chacun l’espace de liberté qui permet le meilleur choix d’activité.

Pourquoi avoir choisi de focaliser sur la jeunesse, thème de votre évènement phare du 24 novembre ? Les relations islamo-chrétiennes sont-elles une affaire des « anciennes générations » que vous souhaitez régénérer ou bien les jeunes s’en emparent-ils désormais pour s’engager dans la société ?

Haydar Demiryurek : Le renouvellement des générations remet toujours en cause ce que l’on croyait acquis. Sans cesse, il faut accueillir les aspirations et favoriser les initiatives des jeunes car elles sont les mieux adaptées à la vie qui est la leur. Nous n’avons pas de recettes toutes faites à leur livrer ; seulement des expériences à leur communiquer, les unes réussies les autres malencontreuses, dont il faut apprendre également.

Lors de ce colloque intitulé « Jeunes chrétiens et jeunes musulmans, bâtisseurs d’avenir », organisé le samedi 24 novembre à l’Institut catholique de Paris, il ne s’agira pas de les exhorter à « prendre le pouvoir », pas plus qu’à démissionner devant leurs impatiences et leur ardeur. Nous les appelons à une rencontre d’égal à égal et de partage réciproque.

Le 8 décembre, le GAIC organise, en lien avec Oran, un évènement célébrant la mémoire des 19 religieux français et des Algériens assassinés lors de la décennie noire. En quoi leur souvenir permet-il d’insuffler de l’énergie dans les relations islamo-chrétiennes d’aujourd’hui ?

Hélène Millet : La cérémonie que nous organisons à Paris en écho à la béatification, par l’Église catholique, des 19 religieux assassinés en Algérie durant la décennie noire entend associer à leur souvenir celui des milliers d’Algériens qui ont aussi perdu la vie à la même époque du fait de leur engagement au service de leur foi ou de leur pays.

Ce n’est pas une originalité de notre part. C’est ce que feront aussi les évêques d’Algérie le 8 décembre, à Oran. Il s’agit d’une célébration de l’amitié et de la fraternité. « Donner sa vie pour ceux qu’on aime », tel est l’enseignement d’amour, porté à son plus haut degré, que tous ces hommes nous ont livré.

Il nous appartient de proclamer que leur sacrifice n’est pas resté vain ; que la décennie noire n’est plus qu’un horrible souvenir. Et que nous sommes tous appelés, aussi bien en France qu’en Algérie, à instaurer des rapports de convivialité et de fraternité entre les êtres humains.

18e SEMAINE DE RENCONTRES ISLAMO-CHRÉTIENNES (SERIC)

Se déroulant principalement du 10 au 25 novembre, de nombreux évènements (rencontres-débats, concerts, repas partagés, visites, spectacles...) ont lieu en octobre et en décembre. Ainsi :
• le 27 octobre, à la basilique de Saint-Denis, la Rencontre islamo-chrétienne des responsables de communautés musulmanes et catholiques du 93
• le 8 décembre, à la chapelle Notre-Dame-des-Anges (Paris), une soirée en souvenir des 19 religieux et des milliers d’Algériens assassinés durant la décennie noire

Voir le programme complet de la 18e SERIC ici.