Après être revenu sur l'origine du mot « révisionnisme » et sa balade dans l'actualité, un spécialiste nous aide à y voir encore plus clair. Valérie Igounet est historienne, spécialiste du négationnisme et de l'extrême droite. Elle est aussi directrice adjointe de Conspiration Watch, l'Observatoire du conspirationnisme. Elle cosigne le texte d'une BD sur le complotisme intitulée « Ils sont partout ! », publiée en mars aux éditions Les Arènes.
Il existe une confusion entre les termes de révisionnisme et de négationnisme. Selon vous, pourquoi est-il si important de les distinguer ?
C'est vrai que le sens propre de l'histoire peut être de la réviser et je vois bien que nous, historiens ou scientifiques, le faisons. Mais nous avons des méthodes totalement différentes et surtout des objectifs qui sont totalement en contradiction. C’est une chose qui est centrale. (…) C’est l'historien Henri Rousso qui a proposé de nommer le négationnisme et de nommer justement leur propagande négationniste dans un ouvrage fondamental qui s'appelle Le syndrome de Vichy, de 1944 à nos jours (en 1987).
Vous êtes directrice adjointe de Conspiration Watch, l'Observatoire du conspirationnisme. Quel lien établissez-vous entre révisionnisme, négationnisme et complotisme ?
Mais le négationnisme, ce n'est pas simplement la négation de la Shoah, ça peut être aussi la négation du génocide arménien ou le fait de prétendre que les goulags soviétiques n'ont jamais existé... Vous ne limitez pas le négationnisme à la question de la Shoah ?
Une autre question qui me paraît assez fondamentale, c'est qu'avec Internet, les réseaux sociaux, en théorie, tout le monde a maintenant accès aux informations nécessaires pour empêcher le négationnisme de se répandre. Pourtant, c'est tout le contraire qui s'opère, on voit que les complotismes, les négationnismes prospèrent. Comment l'expliquez-vous ?
Avant, moi, quand je faisais mes recherches historiques, je me rendais dans des lieux, par exemple dans des librairies d'extrême droite, pour chercher la documentation négationniste. Aujourd'hui, je n'ai qu'un clic à faire pour la trouver. Je crois que cet exemple est assez parlant. Et on peut aussi tomber par hasard sur des sites, sur des hommes, des femmes, des figures de proue du complotisme, lire leur « littérature » et se dire de nouveau « Pourquoi pas ? ».
Alors que fait-on ? Une vaste question.
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Pierre Henry est le président de l’association France Fraternités, à l’initiative de la série « Les mots piégés du débat républicain », disponible également en podcast sur Beur FM.
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