Lycée Averroès : la justice confirme la résiliation du contrat d’association avec l’Etat

Par Hanan Ben Rhouma, le 22/07/2024

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Le lycée Averroès ne pourra pas bénéficier de subventions publiques à la rentrée 2024-2025. L’association gérant l’établissement privé musulman a été déboutée, lundi 22 juillet, de sa demande de maintien à titre provisoire du contrat d’association avec l’Etat dans l’attente d’une décision au fond.

C’est la douche froide pour la communauté éducative du groupe scolaire Averroès de Lille. Le tribunal administratif de Lille, qui a été saisi une seconde fois en référé par l’association gérant le lycée privé musulman ainsi que par les associations représentant les personnels de l’établissement et les parents d’élèves, a confirmé, lundi 22 juillet, sa position en jugeant que, « eu égard aux informations qui lui ont été soumises, il n’y a pas lieu de maintenir le contrat d’association liant le lycée Averroès à l’Etat jusqu’à ce que la décision de résiliation de ce contrat, prise par le préfet du Nord, soit examinée par les juges du fond ».

La cour avait confirmé en février dernier l’arrêt des subventions publiques à partir de la rentrée 2024-2025 décidé par arrêté du préfet du Nord en décembre 2023. Elle avait alors estimé, « compte tenu des éléments dont il disposait alors, que l’association Averroès avait bien, comme la décision attaquée le lui reprochait par certains de ses motifs, manqué à deux titres à ses obligations ». Il avait jugé, lit-on dans son ordonnance, que « le lycée s’était soustrait à deux reprises au contrôle qu’exercent les services de l’Education nationale sur les établissements d’enseignement privé sous contrat en matière de conformité des fonds documentaires des centres de documentation et d’information (CDI) avec les programmes ainsi qu’avec les objectifs de l’Education nationale en termes de respect des valeurs de la République, en particulier en s’opposant sans motif suffisant à un contrôle inopiné du CDI prévu le 27 juin 2022 ».

Par ailleurs, « il avait considéré qu’il était suffisamment établi que les cours d’éthique musulmane dispensés au lycée reposaient essentiellement sur une version des commentaires des "Quarante hadiths de l’imam An-Nawawi" qui comporte des appréciations contraires aux valeurs de la République, notamment sur l’égalité entre les hommes et les femmes, l’application de la peine de mort en cas d’apostasie et la supériorité des lois divines sur toute autre considération et que le refus du lycée de faire procéder à un contrôle de son fonds documentaire ne permettaient pas de démontrer que ces commentaires ne seraient pas le support pédagogique utilisé par les élèves pour le cours d’éthique musulmane ».

La poursuite du contrat d'association « de nature à porter une atteinte excessive à l’intérêt général »

En conséquence, « quels que soient les vices qui, selon les associations requérantes, affectaient la régularité ou le bien-fondé des autres motifs de la décision de résiliation », le tribunal a estimé que « la poursuite des relations contractuelles jusqu’à l’examen du recours au fond, était de nature à porter une atteinte excessive à l’intérêt général, ce qui l’avait conduit à rejeter ces premières demandes ».

Bien que la direction de l’établissement ait expliqué avoir pris diverses mesures qui mettaient fin aux manquements relevés, le tribunal a décidé de rejeter son recours. « S’il pouvait exister un doute sérieux sur la régularité de la procédure suivie avant l’intervention de la décision de résiliation ainsi que sur le bien-fondé de certains des reproches adressés par le préfet au lycée Averroès, les deux manquements relevés au mois de février, quand bien même ils auraient donné lieu à des mesures de correction, faisaient toujours obstacle à la reprise provisoire du contrat d’association, eu égard à la nature de ces manquements », estiment les juges.

De plus, ces derniers ont noté un troisième manquement qui est, « par sa gravité, de nature à justifier le refus de maintenir provisoirement le contrat dans l’attente du jugement au fond ». Celui-ci « tient à la constitution irrégulière, par le directeur de l’établissement de l’époque, d’un fichier recensant certaines données personnelles des agents des services de l’Education nationale intervenus lors d’une précédente inspection, notamment leur nom et leur photographie ».

La direction du lycée Averroès, qui n’a pas encore réagi à cette décision, est en « danger de mort lente », avait rappelé l'avocat Me Sefen Guez Guez au cours de l'audience du 11 juillet. L'arrêt des subventions devra amener la direction du lycée à augmenter fortement les frais de scolarité des élèves afin de compenser l'énorme perte qui servait, entre autres, à payer les professeurs. Il devrait pousser environ 210 élèves vers la sortie (sur 470), à savoir les boursiers ainsi que les élèves dont les parents n'auront plus les moyens de payer l'école car son coût passerait de 1 350 à 2 760 € par an.

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