Riz Ahmed au-devant de la lutte contre les représentations négatives des musulmans au cinéma

Par Myriam Attaf, le 15/06/2021

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Combattre les représentations négatives dont les musulmans sont souvent victimes au cinéma, c’est l’ambition portée par l’acteur récemment nommé aux Oscars Riz Ahmed. Afin de lutter contre les stéréotypes, l’artiste de confession musulmane a lancé une initiative visant à favoriser une représentation plus juste des musulmans dans l’industrie du divertissement.

C’est un appel à un changement en profondeur que lance Riz Ahmed. L’acteur britannique d’origine pakistanaise et de confession musulmane, récemment nommé aux Oscars, dans la catégorie du Meilleur acteur pour son rôle dans le long métrage du réalisateur Darius Marder, The Sound of Metal, souhaite combattre les stéréotypes dont sont victimes les musulmans dans l’industrie du cinéma.

Pour ce faire, l’acteur a choisi de lancer via sa société de production Left Handed Films le projet « The Blueprint for Muslim inclusion », une initiative créée en partenariat avec la fondation musulmane Pillars Fund, basée à Chicago, la Fondation Ford et l'USC Annenberg Inclusion Initiative, le laboratoire de réflexion associé à l’école de journalisme et de communication USC Annenberg.

Dans le cadre de cette initiative, Riz Ahmed et ses partenaires entendent financer et soutenir de jeunes réalisateurs qui débutent leur carrière en leur offrant une bourse de 25 000 dollars (20 000 euros). Cette dernière leur sera attribuée par un jury composé de noms célèbres tels que l'humoriste Ramy Youssef, l’acteur oscarisé Mahershala Ali ou encore le comédien et commentateur politique, Hasan Minhaj.

Outre ce coup de pouce généreux, « The Blueprint for Muslim Inclusion » compte aussi mettre en place de multiples actions et divers outils pour inciter les sociétés de production à proposer une représentation plus juste des musulmans. Parmi les opérations, figure le « Muslim Visibility Challenge » dont l’objectif est notamment d’inciter producteurs à s’appuyer sur l’avis consultatif d’un réalisateur de confession musulmane pour être en capacité de proposer des narrations alternatives.

Des musulmans sous-représentés et victimes de stéréotypes

L’initiative The Blueprint for Muslim Inclusion a été lancé en réponse à l’étude « Oubliés et critiqués : la réalité sur la représentation des musulmans dans les films populaires mondiaux », réalisée par l'USC Annenberg Inclusion Initiative et financée par Riz Ahmed.

Elle révèle qu’entre 2017 et 2019, moins de 10 % des 200 films les plus rentables aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Nouvelle-Zélande et en Australie compte au moins un figurant identifié comme musulman. Pire encore, seuls 1,6 % des 8 965 personnages qui ont des répliques dans ces films sont musulmans alors que près d'un quart de la population mondiale est musulmane.

Lorsqu'ils sont présents, l’étude souligne que ces personnages sont le plus souvent décrits comme des individus représentant une menace, subversifs ou marginaux. Ils sont aussi souvent dépeints comme des étrangers, ne parlant pas l'anglais ou le parlant avec un accent et ne reflètent absolument pas la grande diversité des musulmans.

Cette sous-représentation, qui plus est stéréotypée, laisse par ailleurs peu de place aux femmes. Sur l’ensemble des 200 films analysés par dans cette étude, 76,4 % des 144 personnages de confession ou de culture musulmane étaient des hommes tandis que 23,6 % étaient identifiés comme des femmes. Un écart qui équivaut à un ratio de 3,2 personnages masculins musulmans pour un personnage féminin.

« Cette étude montre l'ampleur du problème dans les films populaires, et ses conséquences se mesurent en potentiels perdus et en vies perdues », a déclaré Riz Ahmed dans un communiqué. « J'en ai marre de voir que des personnages musulmans à l'écran sont soit négatifs, soit inexistants. L'industrie doit changer », a-t-il présenté dans une vidéo au cours de laquelle il invite le monde du divertissement et la société civile à agir contre la discrimination des musulmans au cinéma.

« La représentation négative des musulmans est un problème qui ne peut plus être ignoré. Et c’est un problème que je ne peux pas résoudre seul ou que quelques professionnels du milieu ne peuvent résoudre sans votre aide », a lancé l'acteur de Star Wars. « Je me suis demandé : si je suis l’exception qui confirme la règle, que doit être la règle ? (…) Je dois vous dire que les exceptions ne changent pas les règles. Au contraire, elles les renforcent », a-t-il insisté.

« Joignez vos mains, ouvrez les yeux et faites le serment solennel de prendre des mesures concrètes. Peut-être que cette lutte ne doit pas être menée que par les musulmans. Il s'agit de notre lutte à tous en tant que raconteurs d’histoires ».

L'initiative de Riz Ahmed n'est pas sans rappeler celle lancée récemment en Grande-Bretagne pour favoriser une meilleure représentation des musulmans dans les petits et grands écrans, avec le soutien de l’Institut britannique du film (BFI), un poids lourd de l'industrie cinématographique et télévisuelle.

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