Latika : « Mon mari ne peut s’empêcher de jouer, c'est un addict »

Par Lalla Chams En Nour, le 09/12/2023

PENDANT LE RAMADAN, SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !
Mon mari est addict aux jeux depuis maintenant plus de dix ans. Aujourd’hui, il joue beaucoup moins mais passe son temps à se cacher dans les bar PMU du coin dès qu'il a un moment. Il retire de l'argent et paye en carte bleue pour que je ne vois pas la somme exacte qu'il dépense.

Je vide le compte joint à chaque fois pour qu'il pense que nous sommes pauvres mais cela ne l'empêche pas de jouer, il diminue simplement ses paris.

Il fait sa prière du matin et rattrape dès qu’il rentre à la maison. Met du Coran dans la maison régulièrement. Mais ne peut s'empêcher de jouer. Il ne fait rien d'autre le week-end, sort jouer et rentre pour suivre sur le portable. Il a même été en arrêt maladie pour être payé sur son compte par la sécurité sociale, pour ne pas tout verser dans le compte joint.

Il joue au chat et à la souris avec moi. Un jour, il m'a dit que c’était de ma faute, que c'était tous les soucis de couple qui avait déclenché tout ça. Il vient d'Algérie, sa famille demande sans cesse de l'aide financière. J'ai décidé de ne plus travailler, j'avais mal au coeur de travailler pour qu'une partie soit dilapidée dans les jeux.

J'ai des enfants qui ne voient rien mais il s'est renfermé et n'a envie de rien dans la maison ni avec ses enfants devenus des hommes de 17 et 18 ans maintenant. L'écart se creuse entre eux et il le ressent, le vit mal mais ne fait rien pour changer ça.

Avec l'entourage, c'est pire, il déteste ma famille, surtout mes beaux-frères pieux et très sérieux, cela le renvoie à ce qu’il n'est pas. Il préfère vivre seul et se cacher pour faire ses bêtises. J'ai même cru qu’il me trompait... Toutes ces dépenses, ces agissements, son mépris et ses colères m'ont fait penser qu’il allait voir ailleurs. Mes recherches ont prouvé que c'était avec les jeux qu'il papillonnait.

Aujourd'hui, je ne réponds plus à ses colères, je le laisse et m'éloigne lorsqu'il est aigri ou nerveux. Lorsqu'il joue, je le sais mais ne dit plus rien ; après tout, c'est son argent et les sommes ont fortement diminué puisque nous n'avons plus les moyens. Il est addict à TikTok aussi à presque 50 ans, comme si c'était dans ses gènes maintenant, l'addiction ! En tout cas, il est absent dans la maison.

A plusieurs reprises, j'ai voulu me rapprocher d'un psychologue pour être aidée mais je ne l’ai pas fait. Merci pour votre aide si vous avez des avis ou conseils.

Lalla Chems En Nour, psychanalyste

Chère Latika,

L’addiction est une maladie, quelle que soit la nature de ce qui est recherché. Alcool, jeux, nourriture, drogue, réseaux sociaux… Votre mari a beau jeu de voir la source de son addiction dans vos problèmes de couple. Cela dit, cela peut jouer pour démotiver et donner envie de compenser une frustration. Les origines de l’addiction remontent à des problèmes anciens, dans la relation parents/enfant, mais vous n’êtes pas son psy, vous ne pourrez pas y faire grand-chose, sauf le convaincre petit à petit qu’il aurait interêt à se soigner.

On voit, à lire votre lettre, qu’il s’est enfermé dans cette sorte de fuite facile, que cela le coupe de ses proches, entraîne de la frustration, donc le pousse à jouer. Un cercle vicieux dangereux. Il semble y avoir également une certaine immaturité, une incapacité à assumer ses responsabilités, ce qui le rend faible et incapable de résister à ses pulsions.

Il lit le Coran, dites-vous, il l’écoute, c’est déjà une bonne chose, mais s’il ne l’incarne pas dans ses actes quotidiens, cela ne suffit vraiment pas. Rappelez-vous (et rappelez-lui) l’exhortation du Prophète Muhammad à entrer dans le « grand jihad », le grand effort contre ses pulsions et la recherche de la connaissance de soi-même.

NDLR: Des conseils précieux sont aussi disponibles sur le site Joueurs Info Service, une plateforme téléphonique existe pour obtenir de l'aide.


La rubrique « Psycho », qu’est-ce que c’est ?

Des psychologues et psychanalystes répondent à vos questions. Musulman(e)s du Maghreb ou de France, professionnel(le)s actif(ve)s exerçant en cabinet, ils réfléchissent à votre problématique et tentent de vous éclairer à travers leur expérience professionnelle et leur pratique spirituelle. Ils peuvent vous aider à y voir plus clair en vous-même ou à mieux décrypter le comportement des personnes de votre entourage.
Ils ne sont pas médecins, même si on les désigne parfois comme des « médecins de l’âme », mais leur rôle est de vous aider à trouver en vous-même la meilleure réponse à vos interrogations sur vos relations aux autres, votre conjoint ou conjointe, vos parents, vos frères et sœurs, vos amis, vos collègues de travail, vos voisins...
Alors, n’hésitez pas, interrogez-les, ils tenteront de vous répondre en s’éclairant des plus belles pensées de l’islam.
Contactez-les (anonymat préservé) : psycho@saphirnews.com