État d’urgence : l’État condamné pour la perquisition violente d’un restaurant halal

Par Lina Farelli, le 23/05/2018

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Trente mois après la violente perquisition dont le restaurant halal Pepper Grill, situé à Saint-Ouen l’Aumône dans le Val-d’Oise a été victime, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rendu son verdict : il condamne l’État et lui impose le paiement d’une amende de 10 000 euros pour réparation du préjudice moral causé et 1 000 euros de frais de justice. Une victoire de taille pour Pepper Grill.

Cette condamnation survient plus de deux ans après les attentats du 13 novembre 2015. L’état d’urgence alors décrété par François Hollande, des milliers de perquisitions administratives ont été effectuées par les autorités.

C’est en plein service du soir que le restaurant halal est perquisitionné le 21 novembre alors qu’une cinquantaine de clients est attablée, sans raison véritable. En plus de la peur générée auprès du gérant de l’établissement et des clients du soir, des dégâts matériels sont constatés. La perquisition ne fera par ailleurs l’objet d’aucune suite par les autorités.

Une requête d’indemnisation pour un règlement de l’affaire à l’amiable est présentée mais la demande est rejetée par le préfet de l’époque, Yannick Blanc, poussant les gérants de Pepper Grill à saisir le tribunal administratif.

« Par décision du 9 mai 2018, le Tribunal administratif de Cergy Pontoise reconnait la faute de l’État dans l’exécution de l’ordre de perquisition administratif et condamne la préfecture à reverser au Pepper Grill la somme de 11 000 euros au titre et du préjudice moral et de l’atteinte à la réputation consécutive à la perquisition inique l’ayant visé », fait valoir la justice dans sa décision rendu publique par l’avocat du restaurant Sefen Guez Guez.

Le fait que « le gérant du restaurant Pepper Grill porte une attention toute particulière à la communauté musulmane, qu’il fait de celle-ci une cible prioritaire » et qu’il met à la « disposition des musulmans deux petites salles de prières » ne justifie en aucune façon ni l’usage de la force par les policiers ni les dégâts matériels.

Pour l’avocat, la condamnation de l’Etat fait jurisprudence. « En d’autres termes, cette décision de justice pourra être utilisée lors de procès traitant d’affaires similaires », indique-t-il auprès du blog Al-Kanz. « La décision rendue est une première par son montant. Elle aura un impact évident en fonction de la détermination des uns et des autres à dénoncer les injustices. »

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