Saint-Denis : la présence de Tariq Ramadan à une conférence sur les violences faites aux femmes indigne

Par Hanan Ben Rhouma, le 19/03/2019

PENDANT LE RAMADAN, SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !
La surprise comme le malaise fut générale, tant du côté des organisateurs que du public venu assister à la réunion publique, organisée lundi 18 mars par la mairie de Saint-Denis, autour de la thématique « Lutter contre les violences envers les femmes au quotidien ».

L'objet du malaise à la source d’une colère : la présence inopinée de Tariq Ramadan, venu en spectateur écouter les échanges. Sauf qu’il n’est pas un auditeur comme les autres, au regard des affaires dans lesquelles il est impliqué : l’intellectuel suisse est mis en examen pour viols depuis février 2018. Libre depuis novembre 2018, l'homme, qui clame son innocence, est sous contrôle judiciaire.

S’il a, certes, la présomption d’innocence de son côté, sa présence a été vécue par les organisateurs et les personnes venues assister au débat présents comme une provocation, d’autant qu’il a refusé de s’en aller malgré les demandes insistantes des organisateurs. Sa présence a d'ailleurs poussé une dizaine de femmes à quitter la réunion publique, selon Hanane Ameqrane.

Jointe par Saphirnews, cette militante du collectif Femmes en lutte 93 ne décolère pas. Elle est arrivée après le départ de Tariq Ramadan, parti une heure environ après le début de la conférence, mais elle, qui juge que « la présomption d'innocence protège les agresseurs », assure que « c'était horrible comme situation, ça a fait porter la responsabilité de la violence de la situation sur les copines » qui sont partis.

La mairie de Saint-Denis dénonce sa présence

« Alors que Tariq Ramadan est plusieurs fois mis en examen pour viol, sa venue dans la salle comme spectateur du débat est une provocation inacceptable », s’est exprimée, dans un communiqué paru mardi 19 mars, la mairie, qui précise ne pas avoir invité l’intellectuel « ni même souhaité sa présence ».

« Il n’appartient pas à la municipalité de s’exprimer sur les procédures judiciaires en cours et il n’est pas non plus possible de faire sortir par la contrainte physique un participant à une réunion publique », indique-t-elle. « La présence de Monsieur Ramadan est cependant totalement inacceptable et indécente. L’élue en charge de l’animation du débat, tout comme de nombreus.e.s participant.e.s, ont ainsi demandé à de multiples reprises à monsieur Ramadan de partir de la salle. Son refus de quitter la salle est une insulte envers les personnes légitimement choquées par sa présence. »

« Rien ne peut justifier qu’un combat aussi important que celui de la lutte contre les violences faites aux femmes soit ainsi parasité et confisqué par de telles provocations », ajoute la municipalité, qui « adresse son soutien et sa solidarité aux femmes qui ont été choquées par sa présence ». « La ville de Saint-Denis demande à monsieur Ramadan de respecter un minimum de décence en laissant en paix celles et ceux qui se battent contre les violences faites aux femmes », conclut-elle.

*Mise à jour : Face au tollé, Tariq Ramadan a réagi pour s'expliquer. « Je ne m’attendais pas à telles réactions et, après un moment d’hésitation, j’ai considéré qu’il n’était pas juste de devoir quitter ainsi une salle publique. Il faut rappeler que, à la lumière des éléments du dossier, je suis très loin d’être condamné et que l’on se doit de respecter jusqu’au bout la présomption d’innocence », a-t-il fait savoir sur les réseaux sociaux, indiquant qu'il « discret et silencieux » pour venir écouter le propos de la politologue Françoise Vergès.

« Cela étant dit, et compte-tenu des réactions suscitées j’aimerais ici exprimé mes excuses et mes regrets si ma seule présence a heurté les sensibilités de certain(e)s participant(e)s à cette table ronde. Il n’y avait aucune volonté de provocation de ma part et je ne veux pas permettre que certains instrumentalisent cet événement à des fins politiques. »

Lire aussi :
Les deux mises en examen de Tariq Ramadan pour viols maintenues
Tariq Ramadan, accusé de viols, porte plainte contre ses accusatrices françaises