Grenoble : le burkini désormais autorisé dans les piscines municipales, bataille judiciaire en vue

Par Lionel Lemonier, le 16/05/2022

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Par 29 voix pour, 27 voix contre et deux abstentions, la délibération portant sur la modification du règlement des piscines a été adoptée, lundi 16 mai, en conseil municipal, avec la bénédiction du maire écologiste Eric Piolle, à l'issue de longs débats. A l’instar des piscines municipales de Rennes où le port du burkini est autorisé, les bassins gérés par la ville de Grenoble vont pouvoir accueillir des baigneuses en maillot intégral ou bien seins nus cet été, à compter du 1er juin.

A condition que la préfecture de l'Isère n’ait pas gain de cause auprès du tribunal administratif qu’il a promis de saisir dimanche 15 mai dans un communiqué, « conformément aux instructions qu’il a reçues du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ».

« Cette délibération, dont l’objectif manifeste est de céder à des revendications communautaristes à visées religieuses, paraît contrevenir au principe de laïcité posé par la loi de 1905 ainsi qu’aux dispositions de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République », estime-t-elle. « Le maire, dans le cadre de ses compétences, s’il doit garantir la liberté religieuse de ses administrés, doit également s’assurer du respect de ces règles. »

Si le juge des référés décide de suivre le préfet dans son raisonnement, il suspendra l’application de cette décision municipale en 48 heures maximum, comme l'explique la Gazette des communes. La ville de Grenoble contestera alors certainement cette décision et il reviendra au tribunal administratif d'apporter un peu de cohérence au regard notamment du règlement des piscines de Rennes, qui autorise en effet le burkini depuis juin 2018.

Depuis quatre ans, et au grand dam de la droite et de l’extrême droite locales, les musulmanes qui le souhaitent peuvent se baigner en burkini dans les piscines municipales rennaises, sous réserve d’accepter les règles d’hygiène suivies par tous : maillot en lycra et passage sous la douche avant de se mettre à l’eau. Ce sujet est même l’un des rares sur lequel se retrouvent la maire socialiste, Nathalie Appéré, et les représentants locaux de la majorité gouvernementale. Mustapha Laabid, ex-député LREM d'Ille-et-Vilaine, expliquait déjà en octobre 2018 au Télégramme qu’il « est contre-productif d’interdire le port du burkini dans les piscines. (…) C’est l’Etat qui est laïc, ce ne sont pas les citoyens. »

Eric Piolle a affirmé qu’il ne s’agissait pas pour sa majorité de « céder à des revendications communautaristes à visées religieuses » comme le dénonce le préfet, mais d’améliorer la liberté individuelle. Que « chacun puisse se rafraîchir vêtu.e ou dévêtu.e comme il ou elle veut, tant que la loi est respectée. Oui, les seins des femmes pourront être libérés, comme ceux des hommes (…) Vous voulez venir les seins nus, venez les seins nus. Vous voulez venir avec un maillot couvrant pour vous protéger du soleil ou pour une raison religieuse, vous pouvez le faire aussi », a expliqué l’édile début mai.

« En autorisant le port du burkini dans les piscines municipales, Eric Piolle acte définitivement sa rupture avec la laïcité et les valeurs de notre République. Face à ce séparatisme et comme je l'avais promis, la Région cesse immédiatement toute subvention à la mairie de Grenoble », a néanmoins fait savoir le président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez.

Entre hurlements de la droite, de l’extrême droite et d’une partie de la gauche, le Parti Socialiste local étant opposé à cette décision, l'opinion risque de subir encore les polémiques politiciennes sur l’autorisation du burkini versus le respect de la laïcité pendant encore un moment.

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