Ils sont désormais des centaines parmi les journalistes français à manifester ouvertement leur solidarité auprès de leurs collègues palestiniens à Gaza. Alors que ces derniers payent un lourd tribut à la guerre, de même que les autres civils gazaouis, des rassemblements ont été organisés dans plusieurs villes du pays mercredi 16 avril, avec des revendications claires avancées. Saphirnews était présent à l'action inédite menée dans la capitale.
Fatima Hassouna est l'une des dernières victimes de la guerre à Gaza. La photojournaliste palestinienne de 25 ans a été tuée avec sa famille, mercredi 16 avril, dans le bombardement de son domicile. « Quant à la mort qui est inévitable, si je meurs, je veux une mort retentissante. Je ne veux pas être une brève dans un flash info, ni un chiffre parmi d’autres. Je veux une mort dont le monde entier entendra parler, une empreinte qui restera à jamais, et des images que ni le temps ni l’espace ne pourront enterrer », avait fait part celle qui préparait son mariage malgré l'horreur dans laquelle l'enclave palestinienne est plongée depuis octobre 2023.
Ce même jour, comme un écho aux mots de Fatima Hassouna, des centaines de journalistes à travers la France se sont mobilisés en solidarité avec leurs confrères et consœurs de Gaza. C'est le cas à Marseille et à Strasbourg. Le plus important rassemblement s'est tenu à Paris, devant l'Opéra Bastille. Près de 200 journalistes - représentant les quelque 200 collègues palestiniens tués au cours des 18 derniers mois - ont répondu présent pour participer à un die-in sur les marches de la place parisienne.
Au fur et à mesure que les noms des morts sont égrenés, les participants, gilets « Presse » sur le dos, pour certains maculés de faux sang, tombent un à un. Dans leurs mains, des pancartes avec les photos et l'identité des défunts viennent rappeler qu'ils ne sont « pas que des chiffres ». Le symbole d'une hécatombe jamais observée dans l'histoire de la presse, « tous conflits confondus », et qui a poussé une quarantaine de rédactions françaises à signer un appel dénonçant la volonté israélienne d'« imposer un black-out médiatique sur Gaza, (de) réduire au silence, autant que possible, les témoins des crimes de guerre commis par ses troupes, au moment où un nombre croissant d’ONG internationales et d’instances onusiennes les qualifient d’actes génocidaires ».
Ce même jour, comme un écho aux mots de Fatima Hassouna, des centaines de journalistes à travers la France se sont mobilisés en solidarité avec leurs confrères et consœurs de Gaza. C'est le cas à Marseille et à Strasbourg. Le plus important rassemblement s'est tenu à Paris, devant l'Opéra Bastille. Près de 200 journalistes - représentant les quelque 200 collègues palestiniens tués au cours des 18 derniers mois - ont répondu présent pour participer à un die-in sur les marches de la place parisienne.
Au fur et à mesure que les noms des morts sont égrenés, les participants, gilets « Presse » sur le dos, pour certains maculés de faux sang, tombent un à un. Dans leurs mains, des pancartes avec les photos et l'identité des défunts viennent rappeler qu'ils ne sont « pas que des chiffres ». Le symbole d'une hécatombe jamais observée dans l'histoire de la presse, « tous conflits confondus », et qui a poussé une quarantaine de rédactions françaises à signer un appel dénonçant la volonté israélienne d'« imposer un black-out médiatique sur Gaza, (de) réduire au silence, autant que possible, les témoins des crimes de guerre commis par ses troupes, au moment où un nombre croissant d’ONG internationales et d’instances onusiennes les qualifient d’actes génocidaires ».
Action de journalistes français devant l’Opéra bastille de Paris pour dénoncer la situation à Gaza et la mort de journalistes palestiniens en faisant leur travail. pic.twitter.com/tLpXDkten6
— CLPRESS / Agence de presse (@CLPRESSFR) April 16, 2025
Une telle mobilisation de la presse en France est inédite, a salué le Syndicat national des journalistes (SNJ), mobilisé dès les débuts de la guerre à Gaza pour alerter sur le sort des journalistes. « Nous sommes plusieurs centaines de journalistes de rédactions différentes, avec des lignes éditoriales différentes, voire même diamétralement opposées. C'est du jamais-vu à ce niveau dans la profession », constate sa secrétaire générale Agnès Briançon. Face à « la tragédie incommensurable en cours à Gaza », il faut dire « ça suffit le black-out médiatique, ça suffit l'impunité, ça suffit les massacres », lance-t-elle sous les applaudissements d'un public venu nombreux en soutien à l'initiative.
Avant elle, et une fois passée la poignante énumération des noms des collègues décédés, la parole est d'abord donnée à des journalistes palestiniens. Rassemblés devant la banderole « Gaza. Stop au massacre des journalistes. Solidarité avec nos collègues », ils dénoncent sans détour un génocide en cours à Gaza et « il est important de le dire au monde », selon l'un d'eux, réfugié en France avec femme et enfants depuis janvier pour fuir les massacres.
« Ce n'est pas une guerre contre le terrorisme comme ils le disent, ce n'est pas non plus une guerre contre le Hamas ou les Frères musulmans, mais c'est un génocide contre les Palestiniens, contre leur cause, contre la justice », signifie-t-il. Son confrère du Syndicat des journalistes palestiniens (PJS) espère, à travers les manifestations du jour qui doivent en appeler d'autres, que le sang versé par ses confrères ne soit pas inutile.
Avant elle, et une fois passée la poignante énumération des noms des collègues décédés, la parole est d'abord donnée à des journalistes palestiniens. Rassemblés devant la banderole « Gaza. Stop au massacre des journalistes. Solidarité avec nos collègues », ils dénoncent sans détour un génocide en cours à Gaza et « il est important de le dire au monde », selon l'un d'eux, réfugié en France avec femme et enfants depuis janvier pour fuir les massacres.
« Ce n'est pas une guerre contre le terrorisme comme ils le disent, ce n'est pas non plus une guerre contre le Hamas ou les Frères musulmans, mais c'est un génocide contre les Palestiniens, contre leur cause, contre la justice », signifie-t-il. Son confrère du Syndicat des journalistes palestiniens (PJS) espère, à travers les manifestations du jour qui doivent en appeler d'autres, que le sang versé par ses confrères ne soit pas inutile.
Des discours offensifs face à une impunité appelée à cesser
Thibaut Bruttin, directeur général de Reporters sans frontières (RSF), se veut offensif pour marquer le soutien ferme de son organisation à l'action. « Ce rassemblement arrive tard. Peut-être trop tard, il faut le reconnaître. Je crois que le discours qui est le nôtre, parfois, est difficilement audible parce qu'il se nourrit de fragilités, de frilosités et de divisions et il faut que cela cesse. La difficulté à faire entendre la cause des journalistes palestiniens, c'est la preuve que le poison insidieux des forces armées israéliennes s'est introduit parfois jusque dans notre propre récit », confesse-t-il.
Le comble de la déshumanisation des journalistes palestiniens, c'est de voir ces derniers « diffamés post-mortem », s'offusque le responsable de RSF. « Je n'avais jamais vu un conflit où lorsqu'un journaliste périt, on vous dit qu'au fond, il était un terroriste. Tout ça n'a aucun sens », dénonce-t-il, avant d'inciter les journalistes « aller à la rencontre du grand public » pour « créer une coalition » qui permettra l'ouverture de Gaza, qui est aujourd'hui une prison doublée d'un cimetière à ciel ouvert. « Gaza est devenue un charnier pour les Palestiniens et ceux qui leur viennent en aide », a dénoncé, plus tôt dans la journée, Médecins sans frontières (MSF).
« L'impunité totale dont jouit Benjamin Netanyahou ne fait que l'encourager à multiplier les crimes de guerre », fustige un porte-parole de la Fédération européenne des journalistes. Et de déplorer que ce qui se passe à Gaza « annonce un monde où règne la loi de la jungle, le terrorisme sous toutes ses formes, à commencer par le terrorisme d'État et le mépris total de l'être humain ». Il exhorte la communauté internationale à « garantir la sécurité des journalistes et des civils à Gaza » et à « tenir les forces d'occupation israélienne responsables de leurs crimes répétés contre les journalistes ».
Le comble de la déshumanisation des journalistes palestiniens, c'est de voir ces derniers « diffamés post-mortem », s'offusque le responsable de RSF. « Je n'avais jamais vu un conflit où lorsqu'un journaliste périt, on vous dit qu'au fond, il était un terroriste. Tout ça n'a aucun sens », dénonce-t-il, avant d'inciter les journalistes « aller à la rencontre du grand public » pour « créer une coalition » qui permettra l'ouverture de Gaza, qui est aujourd'hui une prison doublée d'un cimetière à ciel ouvert. « Gaza est devenue un charnier pour les Palestiniens et ceux qui leur viennent en aide », a dénoncé, plus tôt dans la journée, Médecins sans frontières (MSF).
« L'impunité totale dont jouit Benjamin Netanyahou ne fait que l'encourager à multiplier les crimes de guerre », fustige un porte-parole de la Fédération européenne des journalistes. Et de déplorer que ce qui se passe à Gaza « annonce un monde où règne la loi de la jungle, le terrorisme sous toutes ses formes, à commencer par le terrorisme d'État et le mépris total de l'être humain ». Il exhorte la communauté internationale à « garantir la sécurité des journalistes et des civils à Gaza » et à « tenir les forces d'occupation israélienne responsables de leurs crimes répétés contre les journalistes ».
Les journalistes face à leurs responsabilités
Du côté du SNJ-CGT, on presse les Etats à « appliquer le mandat d'arrêt international contre Benjamin Netanyahou » pour en finir avec l'impunité dont il jouit avec son gouvernement et l'armée. Aussi, « il est fondamental et nécessaire que nous, journalistes, exprimions notre indignation car le droit à l'information de tous les citoyens du monde est attaqué, mais nous n'oublions pas de souligner que les massacres des populations civiles, des femmes et des enfants sont intolérables ». Les professionnels de l'information sont ainsi appelés à « se battre dans leurs rédactions pour que le traitement médiatique de la destruction de Gaza et du massacre de sa population soit à la hauteur de sa gravité ».
Pour Reporters solidaires, « chacun de nous a le devoir de secouer le reste de la profession et l'autocritique s'impose ». Dénonçant certains médias - sans les nommer - ayant ces derniers mois « régurgité le narratif israélien qui occulte le contexte colonial et les décennies d'oppression du peuple palestinien », l'association martèle qu'il s'agit d'un « génocide » et ne pas nommer la réalité comme telle, « c'est insulter le travail des journalistes palestiniens qui payent de leurs vies le fait de rendre compte de l'hécatombe de leur propre peuple ».
Le mot de la fin ici, nous le laissons au journaliste palestinien Rami Abou Jamous, qui a adressé un message audio à ses confrères et consœurs français depuis Gaza : « Que cette cérémonie soit plus qu'un hommage, qu'elle soit une promesse : celle de protéger la liberté de la presse partout où elle chancelle, celle de porter la parole des opprimés quand elle vacille, celle de faire triompher la lumière sur les ténèbres. » Citant le journaliste Albert Londres qui disait que « notre métier est de porter la plume dans la plaie », il assure que, si « la plaie est vive à Gaza », « la plume est toujours là, et nous la porterons ensemble. (...) Vous êtes la voix des sans-voix, la mémoire face à l'amnésie, et ensemble, nous continuerons. Merci beaucoup ».
Lire aussi :
Nous, journalistes français, il est de notre devoir de manifester notre solidarité avec nos collègues palestiniens
Un collectif de rédactions françaises et de syndicats de journalistes se mobilisent pour leurs collègues à Gaza
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