L'historien André Miquel, spécialiste de langue et de littérature arabes, est mort

Par Lionel Lemonier, le 29/12/2022

PENDANT LE RAMADAN, SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !

L'historien spécialiste de langue et de littérature arabes André Miquel, nommé professeur dans le prestigieux Collège de France en 1976, est décédé à l'âge de 93 ans.

Historien arabisant français et spécialiste de la langue et de la civilisation arabes, André Miquel est mort à Paris à l’âge de 93 ans, mardi 27 décembre 2022. Il a été titulaire de la chaire de langue et littérature arabes classiques au Collège de France de 1976 à 1997, puis administrateur général de cette institution. Ce fils d’instituteurs est né le 26 septembre 1929 à Mèze (Hérault) d'un père farouchement laïc qui entretenait des rapports extrêmement distants avec le curé de son village. Mais, raconte Le Monde, le jeune André avait également une tante très pieuse qui lui fera découvrir le sacré.

Son entrée dans la religion catholique ne l’empêche pas de s’intéresser dès l’adolescence au Coran… grâce à la géographie. C'est cette matière au Concours général de 1946 qui permet au lycéen André Miquel de gagner un périple en Méditerranée. Il revient de ce voyage avec des souvenirs pleins la tête mais aussi un intérêt croissant pour le livre saint de l’islam. Puis il se tourne vers la littérature comparée et intègre en 1950 l’École normale supérieure (ENS) à Paris. Il en sort agrégé de grammaire mais se tourne vers des textes de géographes arabes du Xe siècle pour préparer une thèse.

Après un intermède à l’Institut français d’études arabes à Damas puis son service militaire et un début de carrière en tant qu’enseignant en lycée, le jeune homme est nommé à la Direction générale des relations culturelles et techniques du ministère des Affaires étrangères, puis chef de la mission universitaire et culturelle française en République arabe unie. Cet Etat créé par l’union de l’Égypte et de la Syrie ainsi que, plus tardivement, du Yémen, n’a duré que de 1958 à 1961.

Les relations de la France gaulienne avec l’Égypte étant exécrables depuis l’intervention des armées françaises et anglaise pour s’opposer à la nationalisation du canal de Suez en 1956, André Miquel est arrêté pour l’exemple en 1961 et passe un peu moins de six mois sous différents prétextes dans les geôles de Nasser. A sa libération, il renonce à une carrière diplomatique et retourne à l’université comme maitre-assistant de langue et de littérature arabes. Puis il enseigne la sociologie de la langue et de la littérature arabes à l’École pratique des hautes études (EPHE). Le début d’une carrière qui le mènera jusqu’au Collège de France, d'abord en occupant la chaire de langue et littérature arabes classiques entre 1976 et 1997 et en exerçant la charge d'administrateur entre 1991 et 1997.

André Miquel, qui occupa aussi la présidence de la Bibliothèque nationale de France (BNF) entre 1984 et 1987, a joué un rôle déterminant de médiateur entre les cultures arabes et française. Un hommage pour l'ensemble de son œuvre lui était rendu en sa présence en 2018, à l'Institut du monde arabe (IMA). « La mort d’André Miquel me remplit de tristesse. Il était un ami proche et surtout un immense universitaire, a fait savoir son président Jack Lang. Son œuvre d’historien arabisant est exceptionnelle. On lui doit en particulier la traduction des Milles et Unes Nuits et des contes de Kalila et Dimna. Nous le pleurerons ».