Après « Sheitan », son premier long métrage, et « La crème de la crème », Kim Chapiron change de registre avec « Le jeune imam » dont le scénario est écrit avec Ladj Ly, auteur du film multiprimé « Les Misérables ». Une œuvre époustouflante comme jamais vue jusqu’ici en France au cinéma.
Le jeune imam nous embarque dans l’histoire du jeune Ali qui, après une péripétie malheureuse, devra quitter sa famille et la France pour se rendre au Mali, pays d’origine de ses parents. Un prix très cher payé qui laissera des séquelles. Après dix années écoulées à apprendre le Coran et la théologie islamique, il revient en France plus posé. Il ne rêve que de reconquérir l’estime de sa famille et surtout de sa mère. Il revêt alors les habits de l’imam mais les anciens démons ne sont jamais très loin. Kim Chapiron nous livre, pour son quatrième long métrage, une œuvre époustouflante d’une profondeur d’âme rarement égalée sur un sujet réputé des plus difficiles. Nous sommes très loin des bouffonneries ramadanesques. Ici pas de faux semblants. Tout sonne juste jusqu’aux lumières naturelles.
L’interprétation du jeune imam par Abdulah Sissoko – son premier rôle au cinéma – se fait avec grâce et sobriété tel un funambule au-dessus d’une jeunesse en éruption. Mme Diallo, la mère d’Ali interprétée par la merveilleuse Hady Berthe, incarne cette maman qui tient le Paradis sous ses pieds, en revêtant toutefois les traits d’une Agar qui aurait abandonné son fils.
Les plans d’une puissance tellurique nous recentrent sur l’essentiel, notamment sur les intentions invisibles qui animent nos actes sur Terre.
Les plans d’une puissance tellurique nous recentrent sur l’essentiel, notamment sur les intentions invisibles qui animent nos actes sur Terre.
Une lumière chirurgicale sur la figure de l'imam posée avec bienveillance
Au fil de la progression narrative, on remarque la présence de cet autre personnage : la pratique religieuse. En effet, on apprécie cette tendresse dans les gestes rituels que viennent renforcer la délicate psalmodie du Coran accompagnée de l’hypnotique « tala’a al badrou’ alayna », qui rappelle ce chant joyeux que les habitants de Médine ont clamé à l'arrivée du Prophète Muhammad. C’est une sincérité précieusement défendue qui ne cède jamais aux sirènes du box-office.
En installant ce climat de confiance, le réalisateur jette en toute bienveillance une lumière chirurgicale. Quelques lymphomes apparaissent dans le corps de la seconde religion de France. Le mélange de genre entre business et religion est ainsi diagnostiqué. Le commerce du halal, des fatwas, du pèlerinage à La Mecque désabusent trop souvent les musulmans de France. Mais il y aussi la naïveté dans laquelle se vautrent beaucoup de fidèles pour garder une zone de confort évitant ainsi de prendre leurs responsabilités.
En installant ce climat de confiance, le réalisateur jette en toute bienveillance une lumière chirurgicale. Quelques lymphomes apparaissent dans le corps de la seconde religion de France. Le mélange de genre entre business et religion est ainsi diagnostiqué. Le commerce du halal, des fatwas, du pèlerinage à La Mecque désabusent trop souvent les musulmans de France. Mais il y aussi la naïveté dans laquelle se vautrent beaucoup de fidèles pour garder une zone de confort évitant ainsi de prendre leurs responsabilités.
Véritable film d’apprentissage, ce jeune imam trébuche à de nombreuses reprises dans un environnement où tout se sait, et où l’erreur n’est pas tolérée. La tentation de faire appel aux outils digitaux pour corriger ses imperfections comme on retouche un bouton de fièvre sur son selfie devient irrésistible. Le moyen est désormais la finalité. La recherche compulsive de likes sur les médias sociaux entraîne le personnage sur les sentiers de l’égo trip, si contraire au cheminement d’un responsable religieux. Ce sera pourtant ce chemin de Taïf qui, spirituellement, le fera grandir.
Il y a donc de quoi espérer. L’imam de France, cœur battant de la religion musulmane, est une figure en devenir. Kim Chapiron et Ladj Ly, co-auteur et réalisateur du film « Les Misérables »,, nous en livrent ici une belle avant-première.
Il y a donc de quoi espérer. L’imam de France, cœur battant de la religion musulmane, est une figure en devenir. Kim Chapiron et Ladj Ly, co-auteur et réalisateur du film « Les Misérables »,, nous en livrent ici une belle avant-première.
Mise à jour : Le réalisateur du film, Kim Chapiron, se confie sur Saphirnews, son interview ici.
Le jeune imam, de Kim Chapiron
France, 1h38
Avec Abdulah Sissoko, Moussa Cissé, Hady Berthé
Sortie en salles le 26 avril 2023
Le jeune imam, de Kim Chapiron
France, 1h38
Avec Abdulah Sissoko, Moussa Cissé, Hady Berthé
Sortie en salles le 26 avril 2023